(Jur) Sanctions pénale et fiscale : application de l’exigence de proportionnalité et « dédommagement » de l’État

 In Droit social

La mise en œuvre du principe constitutionnel de proportionnalité selon lequel, si l’éventualité que deux procédures, pénale et fiscale, pour des faits de fraude fiscale soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne doit pas dépasser le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues, s’applique devant le juge qui se prononce en dernier, qu’il soit le juge pénal ou le juge de l’impôt. Il s’en déduit qu’elle n’implique aucune mesure de sursis à statuer devant le juge répressif.Il se déduit des articles 132-1 du Code pénal et 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale qu’en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle.Hormis le cas où la confiscation, qu’elle soit en nature ou en valeur, porte sur un bien qui, dans sa totalité, constitue l’objet ou le produit de l’infraction, le juge, en ordonnant une telle mesure, doit apprécier le caractère proportionné de l’atteinte portée au droit de propriété de l’intéressé lorsqu’une telle garantie est invoquée ou procéder à cet examen d’office lorsqu’il s’agit d’une confiscation de tout ou partie du patrimoine.Il incombe en conséquence au juge qui décide de confisquer un bien, après s’être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l’origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s’expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l’atteinte portée au droit de propriété du prévenu.La cour d’appel de Paris confirme la condamnation de SCI, déclarées coupables de complicité de fraude fiscale par organisation d’insolvabilité et blanchiment, à la confiscation, à titre de peine principale, de biens immobiliers leur appartenant, en retenant que sa dirigeante est la représentante légale de ces sociétés et l’associée très largement majoritaire, à hauteur de 98% et de 99%, motifs qui ne précisent pas la nature et l’origine des biens confisqués, ni le fondement de la mesure et, par conséquent, ne permettent pas d’apprécier l’étendue de l’exigence de motivation des juges du fond.Il se déduit des articles 2 du Code de procédure pénale et L. 232 du Livre des procédures fiscales que si les juges répressifs, saisis de poursuites des chefs de fraude fiscale et blanchiment, peuvent indemniser l’État du dommage résultant du blanchiment, ils n’ont pas compétence pour réparer le préjudice subi par le Trésor public du fait du délit fiscal, qui est indemnisé par les majorations fiscales et les intérêts de retard.La cour confirme le jugement ayant condamné la prévenue, solidairement avec une coprévenue, à payer à l’État, partie civile, la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts, en énonçant que la constitution de partie civile de l’État est recevable au titre du préjudice découlant directement du comportement frauduleux résultant des faits de blanchiment et que « le tribunal a justement apprécié ce préjudice résultant non seulement du revenu généré et des actifs en capital qui échappent à l’assiette de l’impôt sur la fortune, mais également compte tenu de l’ancienneté des faits et de l’importance de la fraude, des procédures multiples mises en œuvre pour recouvrer ses créances, ce tout particulièrement à une période de déficits budgétaires importants ».Ainsi, en se prononçant par des motifs qui ne mettent pas la Cour de cassation en mesure de s’assurer que les juges n’ont pas inclus dans l’indemnisation le préjudice issu de la fraude fiscale, la cour d’appel ne justifie pas sa décision. 

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